Notre premier voyage lié le projet, nous a amené au Japon pour y découvrir des jardins dont la particularité est de sembler naturels bien que maitrisés sous certains aspects.
Le visiteur peut être étonné de trouver des jardins d'inspiration japonaise dans notre parc consacré aux essences méditerranéennes, mais notre objectif pour ce parc est de donner au visiteur une expérience s'inspirant de la philosophie japonaise.
Le jardin japonais possède des racines chinoises. Le Japon longtemps fermé aux influences extérieures, s'est peu à peu ouvert, et les échanges se sont multipliés jusqu’à l’introduction de nouvelles religions, de nouvelles mœurs. Cette évolution a naturellement généré différentes conceptions d’un jardin, en référence à un état d’esprit, une philosophie mais également une volonté d’assimilation ou d’intégration.
Certaines caractéristiques des jardins japonais sont considérées à tort comme «le jardin japonais» unique et immuable . Les anciens jardins japonais possèdent des aménagements et des plantations variés, mais présentent également des caractéristiques communes. Le plus évident est l'utilisation de lanternes, d'eau, de pierres et de ponts. Pour le profane, la disposition subtile et le chemin devant être parcouru par le visiteur sont moins visibles dans le jardin. Ce qui frappe c'est le sens de l'harmonie et de la tranquillité sans que l'on sache vraiment ce qui crée cette quiétude.
Nous souhaitons offrir au visiteur un espace où la nature est maitrisée jusqu’à un certain point. Cette maîtrise n’a d’intérêt que si elle sublime l’état originel. Quand les végétaux à l’état naturel, apportent beauté et équilibre, il n’y a pas lieu d’en modifier l’aspect. Cette option favorise la création de ruptures visuelles propre à la conception des jardins japonais. La force de chaque sujet (végétal ou autre), de chaque espace, s’appuie sur la force des autres éléments. Soit en harmonie soit en opposition afin de créer une sensation d’équilibre (principe du Yin et du Yang). Ainsi des rochers tourmentés côtoient des sentiers ou la rivière.
Nous nous appuyons sur la structuration des éléments végétaux afin de donner l’idée qu’ils sont naturellement implantés dans le but de sublimer la nature. Ils seront, soit laissés dans leur état d’origine, et s'ils sont taillés se ne sera que pour révéler leur vraie beauté.
Grâce à l'utilisation de la profondeur, nous essayons de créer une sensation d'espace. Le style japonais repose sur le double principe de la perspective si la vue lointaine est intégrée et sur la coexistence de plans juxtaposés. Ainsi le créateur va implanter des espaces actifs (végétal) dont les zones intermédiaires seront occupées par des espaces passifs (minéral ou aquatique / pierre ou eau).
De la fin de la période Shogun (1850) jusqu’après 1945, qui verra le Japon s’ouvrir à l’occident, les paysagistes japonais ont adapté leur savoir-faire traditionnel à de nouvelles exigences.
Ils ont gardé leur typicité tout en s’adaptant aux modes venues d’ailleurs. Il est ainsi devenu courant de voir des espèces occidentales intégrées dans ce type de jardin tel que le platane occidental (Platanus orientalis), le cornouiller (Cornus florida) ou le lagerstroemia (Lagerstroemia indica).
Le mineral.
Roche, cailloux, gravier et sable seront choisis en fonction de leur taille, couleur ou texture. L’élément minéral intervient soit en rupture entre deux plans, soit s’il est tourmenté, en sujet principal du tableau. Les rochers symboliquement abritent les esprits dans la culture animiste ancestrale. Positionnés au pied des arbres plantés en bordure de rivière, ils structurent l’arrivée vers les cascades. Les pierres plus modestes affleurent en transparence sous l’eau en rupture avec l’horizontalité de l’eau. Des allées de terre, du gravier, de sable et des tremplins, dans ce style de jardin, vous n'allez pas n'importe où. Le chemin indique le meilleur endroit pour profiter du jardin.
L’eau.
Outre le reflet des arbres, pierres et objets décoratifs, elle est le miroir du ciel. Dans la conception stricte du jardin japonais le ciel ne fait pas partie du « tableau » sauf à s'y trouver par ce jeu de reflet. Créant ainsi une parfaite symétrie entre ce qui est en haut et ce qui est en bas. Rivières, mares, étangs et chutes d’eau, sont souvent associés à une île, un pont et des pierres afin de trouver un équilibre. Les rivières et les cascades font tourner l'esprit du visiteur et l'inspirent à découvrir le jardin. Elle agit également sur la sonorité du lieu. Son clapotis ou sa chute, rappellent la nature sauvage. Dans un jardin sec, l’eau sera symboliquement représentée par du gravier formant ainsi des rivières "séches".
Sculpture et objets.
L’apparition de « pont » en pierre est relativement récente. A priori parce que le minéral a longtemps été utilisé dans son état brut. Il arrivait souvent qu’on le positionne exactement comme il l’était à l’origine dans la nature sauvage. Le pont constitue un passage intermédiaire permettant l’accès à un ilot. Ilot pouvant figurer l'accès à un autre état de vie. Les Lanternes, statues viennent rappeler la présence de l’homme dans sa dimension spirituelle.
La delimitation.
Haie, palissade, mur, la notion de limite n’est pas absolue. Si la perspective contient un intérêt visuel (vue sur des montagnes, des temples ou autres), elle sera intégrée au « tableau ». A contrario, dans un espace réduit (jardins citadins par exemple), les limites d’un jardin sont occultés mais également mis en valeur.
Étant un parc méditerranéen, nous voulons concevoir les espaces dans l'esprit des jardins japonais en associant quand cela est possible, les espèces méditerranéennes à la philosophie japonaise. Les jardins doivent être appréhendés comme des tableaux vivants dans lequel le promeneur peut presque librement évoluer. Cette idée a été notre fil conducteur pour la création de la rivière et ses abords, au sud du Parc du Château.